Paris. Impr. Guiraudet et Jouaust, 338, rue S.-Honoré.
NOUVELLE ÉDITION
Revue sur les pièces originales et annotée
PAR M. ÉDOUARD FOURNIER
AVEC UNE INTRODUCTION
PAR M. LE ROUX DE LINCY
A PARIS
Chez P. Jannet, Libraire
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MDCCCLV
TABLE ANALYTIQUE. TABLE DES MATIÈRES |
L'ouvrage dont nous donnons une édition complète, revue sur lesoriginaux, est une des satires les plus remarquables du dix-septièmesiècle. Publiés pour la première fois dans le cours de l'année 1622, parpetits cahiers de quelques feuillets, les Caquets de l'Accouchéefurent, dès l'année suivante, réunis dans un seul volume, dont il y eutplusieurs éditions, sous le titre de Recueil général des Caquets del'Accouchée[1].
Pendant le cours du dix-huitième siècle, ce livre n'a jamais cesséd'être fort apprécié des bibliophiles, qui payoient très cher lesexemplaires bien conservés des éditions originales. De nos jours, lesCaquets de l'Accouchée ont conservé la même valeur, et, cette fois,l'engoûment des amateurs peut se justifier: ce n'est pas seulement larareté de l'ouvrage, c'est encore l'esprit qu'on y trouve, qui lespousse à se le procurer. Voyons d'abord ce qu'il faut entendre parCaquets de l'Accouchée.
Au moyen âge, la naissance d'un enfant étoit entourée de soins et decérémonies qui n'existent plus maintenant. Chez les grands et chez lesriches, on se préparoit à cet événement solennel par des attentionstouchantes qui se rattachoient aux croyances et aux superstitions decette époque. La chambre de la gisante étoit tendue des étoffes et destapisseries les plus belles; une petite couchette, connue encore de nosjours sous le nom de lit de misère, étoit placée auprès du grand litnuptial; un bon feu brûloit incessamment dans la vaste cheminée; deslinges de toutes sortes, tirés des grands bahuts, séchoient à l'entour.Dans certaines provinces, on mettoit devant la cheminée une petite tablecouverte de linge très fin; sur cette table, trois coupes, un pot de vinou d'hippocras, trois pains de fleurs de farine et deux flambeaux quirestoient allumés durant la nuit. Ce repas frugal étoit destiné auxfées, qui, d'après les croyances, devoient venir répandre leurs dons surle nouveau-né. On lit dans le roman de Guillaume au Courtné, qui remonteà la seconde moitié du XIIe siècle:
«Il y avoit alors en Provence, et dans plusieurs autres pays, unecoutume qui consistoit à placer sur la table trois pains blancs, troispots de vin, et trois hanaps ou verres à côté; on posoit le nouveau-néau milieu, puis les matrones reconnoissoient le sexe de l'enfant, quiensuite étoit baptisé.
«Le fils de Maillefer fut donc ainsi exposé, et les matrones, aprèsl'avoir vu, s'éloignèrent. Tout dormoit dans la chambre quand cetteaventure eut lieu. Le temps étoit beau, la lune brillante. Alors troisfées entrèrent, prirent l'enfant, le réchauffèrent, le couvrirent e