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LÉGENDE CANADIENNE

LE CAP AU DIABLE

Par Chs. DeGuise, M. D.

1863

LÉGENDE

I

"Quel est le Canadien, s'écrie un savant géographe dont le nom seratoujours cher parmi nous, quel est le Canadien qui n'aimerait pas sapatrie, après l'avoir contemplé quelque heures, du bord d'une de nosbarques à vapeur, sur la route de Québec à Montréal! Quel spectacleenchanteur! Que de points de vue admirables! Quelle suite de campagnesriches, paisibles, heureuses, se déploient sur l'une et sur l'autrerive, d'aussi loin que l'oeil peut atteindre! La scène offre quelquechose de plus grand, de plus varié, de plus ravissant encore, peut-être,si l'on descend le fleuve jusqu'au Saguenay."

Oui, quel plaisir pour l'oeil étonné et charmé tour à tour, decontempler sur la rive nord, cette chaîne de montagnes sourcilleuses,ces caps abruptes, ces vallées alpestres, cette nature si rude, siaccidentée, et parfois si sauvage. Quel est l'étranger qui n'envie pasle bonheur du paisible propriétaire de ces maisons blanchies, suspenduesau flanc des coteaux, ou qui couronnent leurs sommets, tranchant ainsisur le fond de verdure qui les environnent, et, lorsque vous avezpéniblement gravi une pente rapide, que vous apercevez à vos pieds, aufond d'une baie, un charmant village arrosé par une belle rivière, etparaissant reposer en paix, sous la protection de la croix du clocher dela vieille Eglise, qui le domine; votre âme aime alors à s'y délasser,pour se remettre des impressions causées par les scènes variées qu'ellevient de contempler.

La rive sud, pour n'avoir pas la sauvage et pittoresque beauté de larive nord, n'a pourtant rien à lui envier, dans son genre. Son site,plus uni, et son sol moins tourmenté, nous offrent quelque chose de pluscalme et de plus champêtre. Ses points de vue ont un horizon plus grand,plus étendu et plus animé. C'est la nature, en quelques endroits,belle de toute sa primitive beauté, ailleurs, enrichie par la vie etl'activité que lui ont donné le travail et la main des hommes.

Mais de quinze à dit-huit lieues de Québec, en descendant le fleuve,vous rencontrez un écueil bien digne d'attirer votre attention: c'est LaRoche Avignon, ou, comme d'autres l'appellent, La Roche Ah Veillons, àcause des dangers qu'elle présentait autrefois à la navigation, avantque le Gouvernement y fit construire un phare. Sur cet écueil vinrentse briser plusieurs vaisseaux d'outre mer, et beaucoup de famillescanadiennes conservent encore un lugubre souvenir des naufrages debâtiments côtiers qui y périrent.

Plus loin, en cinglant vers le sud, et avant que d'arriver au charmantvillage de Kamouraska, vous apercevez un cap, dont la vue vous frappeet vous impressionne péniblement. Son aspect est morne et sombre, lesrochers qui le composent sont arides et dénudés, son isolement, lesilence et la nature désolée et presque déserte qui l'environnent, sonéloignement du toute habitation; tout, enfin, concourt à jeter dansvotre âme un malaise étrange et inexprimable. Quelques bas fonds quil'avoisinent en rendent l'approche difficile, si impossible, non mêmeaux bâtiments d'un faible tonnage. Ce Cap, c'est le "Cap au Diable."

Mais d'où vient donc ce nom qu'enfants, nous ne pouvions entendre sansfrémir? A-t-il été le théâtre de quelques apparitions infernales, oubien a-t-il servi de repaire à quelque bande de brigands; et les bruitsconfus qu'on y entend ne sont-ils pas tes cris de vengeance des victimesensanglantées que l'on trouva à ses pieds, ou dans son voisinage?personne ne le sait; la

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